JURISMONTAGNE
PLATEFORME JURIDIQUE AU SERVICE DES ADHÉRENTS
DE L'ASSOCIATION NATIONALE DES MAIRES DES STATIONS DE MONTAGNE
CONNEXION

La sécurité et les secours sur le domaine skiable

Fiche publiée le 26/02/2020
(dernière mise à jour le 10/03/2020)
Description :
sécurité - secours - domaine skiable - exploitant - maire - service public - remontées mécaniques. L'exploitant des services publics des remontées mécaniques et de l'exploitation des pistes de ski est chargé d'assurer la sécurité des usagers du service et des tiers.

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Textes

  • Articles L 2212-1 à L 2212-9 du CGCT.
  • Article 1240 du code civil.

Les obligations du maire, autorité de police municipale

AU TITRE DE SES POUVOIRS DE POLICE, LE MAIRE A EN CHARGE LA SURETÉ ET LA SÉCURITÉ SUR SON TERRITOIRE

Aux termes des dispositions de l’article L 2212-1 du CGCT, « le maire est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, de la police municipale, de la police rurale et de l'exécution des actes de l'Etat qui y sont relatifs », et l’article L 2212-2 du même code précise que « la police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques ».

L’article L 2212-1, 5°, du CGCT dispose que la police municipale comprend notamment le soin de : « prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tels que les incendies, les inondations, les ruptures de digues, les éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents naturels (…), de pourvoir d’urgence à toutes les mesures d’assistance et de secours (…) ». Le pouvoir de police municipale est un pouvoir propre du Maire, qui ne peut faire l’objet d’une convention de délégation à un tiers. Le Maire peut toutefois déléguer une partie de ses fonctions à l’un de ses adjoints ou, en cas d’empêchement de ceux-ci, à un membre du conseil municipal (article L 2122-18 du CGCT). S’il désigne un directeur des pistes, celui-ci n’est que son préposé et ne le décharge en rien de sa responsabilité en tant qu’autorité de police.

Seules peuvent être déléguées à des tiers par des conventions spécifiques des missions matérielles de prévention, de sécurité ou de secours (par exemple le balisage des pistes, l’information des usagers, le transport des personnes blessées, …). Les mesures matérielles à prendre en matière de prévention et de sécurité (balisage, signalisation, information, dispositifs de protection, …) font l’objet de normes régulièrement mises à jour.

LA RESPONSABILITÉ ADMINISTRATIVE DE LA COMMUNE PEUT ÊTRE RECHERCHÉE SUR UN DOUBLE FONDEMENT :

En cas d’accident, la responsabilité de la Commune peut être recherchée : 

  • Au titre des pouvoirs de police du Maire.

Les insuffisances des mesures de police prises par le Maire engagent la responsabilité de la Commune devant le juge administratif sur le fondement de la faute simple[1]. À titre d’illustration, ont permis d’engager la responsabilité d’une Commune un défaut de signalisation d’une dénivellation profonde et abrupte[2], un amas de grillages enfouis sous la neige[3], l’absence de signalisation d’une clôture[4], une ouverture imprudente des pistes[5]. 

  • Au titre des dommages de travaux publics.

Certains éléments accessoires de sécurité qui bordent la piste ou contribuent à l’information des usagers (poteaux soutenant un filet de protection, panneaux de signalisation, …) sont considérés par la jurisprudence comme des ouvrages publics[6].

Les dommages dont ces ouvrages peuvent être à l’origine sont dès lors considérés comme des dommages de travaux publics, qui engagent la responsabilité sans faute de la personne publique devant le juge administratif. Il convient de relever que dans son arrêt Commune de Val d’Isère du 28 avril 2014[7], le Conseil d’Etat ayant considéré comme relevant du domaine public de la Commune une piste de ski ayant fait l’objet d’un « aménagement indispensable à son affectation au service public de l’exploitation des pistes de ski », celle-ci peut, pour la même raison[8] désormais constituer un ouvrage public, susceptible en tant que tel de générer une responsabilité pour dommage de travaux publics…

Les obligations de l’exploitant du service de remontées mécaniques

L’exploitant du service des remontées mécaniques et des pistes de ski est, en cette qualité, responsable des dommages que cette exploitation est susceptible de causer aux usagers ou aux tiers. Si le service public a été délégué, cette responsabilité est celle du délégataire. S’il est géré en régie, elle est celle de la collectivité publique elle-même. Il doit donc prendre les mesures appropriées afin d’assurer la sécurité de l’usage des remontées mécaniques et des pistes de skis. Tant le service public des remontées mécaniques que le service d’exploitation des pistes de ski sont des services publics industriels et commerciaux[9] .

Il en résulte que le régime de responsabilité applicable ne sera pas le même selon que la victime est usager du service ou tiers par rapport à celui-ci : 

  • Les liens entre les services publics industriels et commerciaux et les usagers sont des liens de droit privé. Il en résulte que les tribunaux judiciaires sont seuls compétents pour connaître de la responsabilité de l’exploitant, que celle-ci soit engagée pour faute ou sans faute, et ils font application du droit de la responsabilité civile. 
  • En revanche, si le dommage est causé à un tiers (c’est-à-dire une personne qui n’a pas la qualité d’usager, ou de « candidat usager ») du service public, et s’il est causé à celui-ci par un ouvrage public (étant entendu qu’ainsi qu’on l’a indiqué, une piste de ski spécialement aménagé peut être qualifiée d’ouvrage public), la responsabilité de l’exploitant est une responsabilité sans faute, pour dommage de travaux publics, qui doit être recherchée devant le juge administratif.


Important

Il convient de souligner le caractère enchevêtré des obligations respectives du maire, en tant qu’autorité de police administrative générale, et de l’exploitant en matière d’obligations de sécurité. Il en résulte une évidente complexité en matière de responsabilité selon que celle-ci est rattachable à une faute du Maire dans l’exercice de ses pouvoirs de police ou à une faute de l’exploitant, en distinguant alors selon la qualité de tiers ou d’usager de la victime par rapport au service, et à l’imputation ou non du dommage à un ouvrage public, qui peut être la piste elle-même !



[1] CE, 28 avril 1967, Lafont, rec. 182.

[2] CE, 22 décembre 1971, Commune de Mont-de-Lans, rec.789.

[3] CE, 25 février 1976, Commune Contamines-Montjoie, rec. 1129.

[4] CE, 9 novembre 1983, Cousturier, rec. T. 858.

[5] CE, 14 mars 1986, Commune de Val d’Isère, rec. T ; 635.

[6] CE, avis, 19 avril 2005, n°31234.

[7] CE, 28 avril 2014, Commune de Val d’Isère, n°349420.

[8] Les critères de « l’ouvrage public » sont quasi-similaires à ceux du domaine public.

[9] CE, 19 février 2009, Beaufils, rec. 61.