Pourquoi recourir à une DSP ?
(dernière mise à jour le 10/03/2020)
Textes
- Article L1 du Code de la Commande Publique
- Article L1111-1 du Code de la Commande Publique
- Articles L 1410-1 et suivants et R 1410-1 et suivants du code générale des collectivités territoriales (CGCT).
- Article L 342-9, L 342-10 et L 342-13 du code du
tourisme.
L’autorité organisatrice du service public
L’article L 342-9 du code du tourisme prévoit que le service des remontées mécaniques, éventuellement étendu aux installations nécessaires à l’exploitation des pistes de ski : « est organisé par les communes sur le territoire desquelles elles sont situées ou par leurs groupements ».
La commune est donc l’autorité organisatrice de base du service public des remontées mécaniques. Cependant un domaine skiable étant susceptible de couvrir le domaine de plusieurs communes, celles-ci peuvent avoir intérêt à se regrouper au sein d’entités publiques auxquelles elles transfèrent leur compétence. L’article L 342-9 prévoit que les communes peuvent également choisir de confier au Département, par convention, dans les limites d’un périmètre géographique défini, l’organisation et la mise en œuvre du service. Il convient de souligner que la convention qui est conclue dans cette hypothèse n’est pas une convention de délégation de service public. Néanmoins, en concluant cette convention une commune est déchargée de sa compétence. En outre le second alinéa de l’article L 342-9 du code du tourisme réserve l’hypothèse dans laquelle les communes ou leurs groupements « s’associent, à leur demande, au département pour organiser ce service ».
Dans cette hypothèse, à la différence du cas précédent, la commune ou le groupement de communes ne sont pas déchargés du service, la compétence s’exerçant en commun avec le département. Enfin le code du tourisme (article L 342-10) a réservé l’hypothèse des remontées mécaniques organisées avant le 10 janvier 1985 (entrée en vigueur de la loi Montagne) par des départements, et qui continuent de relever de leur compétence. Dans ce cas, le département peut lui-même confier par convention aux communes ou à leur groupement l’organisation et la mise en œuvre du service.
La liberté de choix du mode de gestion
L’article L1 du Code de la Commande publique dispose que les autorités concédantes : « choisissent librement, pour répondre à leurs besoins, d'utiliser leurs propres moyens ou d'avoir recours à un contrat de la commande publique ». Dans le premier cas le service est géré en régie, dans le second cas il est concédé, ce qui correspond, pour les collectivités territoriales, à une convention de délégation de service public. L’article L342-13 du code du tourisme, qui s’applique spécifiquement aux remontées mécaniques et pistes de ski, dispose que l’exécution du service est assurée : « soit en régie directe, soit en régie par une personne publique sous forme d’un service public industriel et commercial, soit par une entreprise ayant passé à cet effet une convention à durée déterminée avec l’autorité compétente ». La convention qui est ici mentionnée est nécessairement une convention de délégation de service public.
Les critères du choix
LA RÉGIE
Lorsque l’autorité organisatrice décide de gérer le service public en régie, elle prend directement en charge son organisation et son fonctionnement. Ce mode de gestion présente pour elle des avantages : la collectivité a la maitrise totale du service, de son personnel, de son administration, de ses finances. Elle peut prendre ainsi à tout moment les mesures qui lui semblent les plus appropriées. Mais ce mode de gestion présente aussi des inconvénients : la collectivité doit disposer des moyens matériels, humains et financiers suffisants pour exploiter le service. Surtout, elle supporte sur son budget le risque d’exploitation, et tous les aléas de celle-ci, alors que l’activité est à la fois une activité saisonnière et exposée aux aléas climatiques.
LE MARCHÉ PUBLIC
Le marché public ne constitue pas en réalité un mode alternatif de gestion du service public, par rapport à la régie, mais plutôt une modalité particulière d’exécution d’un service. L’article L1111-1 du Code de la Commande Publique définit le marché public comme : « un contrat conclu par un ou plusieurs acheteurs soumis au présent code avec un ou plusieurs opérateurs économiques, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services, en contrepartie d'un prix ou de tout équivalent. ».
La collectivité publique doit donc recourir à un marché public pour réaliser des travaux : ainsi une commune qui déciderait de gérer en régie son service des remontées mécaniques devrait conclure un marché public pour la construction des équipements. Elle peut aussi conclure un marché pour se procurer un service. Un marché public peut ainsi avoir pour objet l’exploitation de remontées mécaniques ou l’entretien de pistes skiables. Un marché peut regrouper les deux prestations, et porter à la fois sur des travaux et sur la fourniture d’un service. L’avantage du marché public pour la collectivité tient à ce qu’il donne lieu au versement d’un prix au cocontractant, connu dès la conclusion du contrat. Il permet également à la collectivité d’exercer un contrôle étroit sur le titulaire du contrat.
Les inconvénients du marché public sont nombreux. D’abord sa durée est nécessairement limitée. L’article 2112-5 du Code de la Commande publique précise que : « La durée du marché est définie en tenant compte de la nature des prestations et de la nécessité d'une remise en concurrence périodique, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, sous réserve des dispositions du présent livre relatives à la durée maximale de certains marchés. ». Ensuite, il fait peser une charge financière importante sur la collectivité publique. Celle-ci doit en effet régler au titulaire du marché le prix convenu dès la prestation effectuée[1]. Or le service des remontées mécaniques nécessite des investissements importants liés au coût des installations et échelonnés dans le temps. Il faudrait donc que la collectivité puisse payer au titulaire du marché en une seule fois le montant des investissements qu’il aura réalisés, ce qui est difficilement envisageable, sauf pour une collectivité qui possèderait la capacité financière nécessaire. En outre les règles fixées par l’ordonnance et le décret relatifs aux marchés publics sont relativement contraignantes[2].
LA DÉLÉGATION DE SERVICE PUBLIC
La délégation de service public correspond aux contrats de concession de service public passés par les collectivités territoriales.
L’article L1411-1 du CGCT la définit ainsi : « Les collectivités territoriales, leurs groupements ou leurs établissements publics peuvent confier la gestion d'un service public dont elles ont la responsabilité à un ou plusieurs opérateurs économiques par une convention de délégation de service public définie à l'article L. 1121-3 du code de la commande publique préparée, passée et exécutée conformément à la troisième partie de ce code. ».
L’article L1121-3 du Code de la Commande publique la définit comme : « une concession de services ayant pour objet un service public et conclue par une collectivité territoriale, un établissement public local, un de leurs groupements, ou plusieurs de ces personnes morales. », or la définition de la concession se trouve à l’article L1121-1 du même code : « Un contrat de concession est un contrat par lequel une ou plusieurs autorités concédantes soumises au présent code confient l'exécution de travaux ou la gestion d'un service à un ou plusieurs opérateurs économiques, à qui est transféré un risque lié à l'exploitation de l'ouvrage ou du service, en contrepartie soit du droit d'exploiter l'ouvrage ou le service qui fait l'objet du contrat, soit de ce droit assorti d'un prix.
La part de risque transférée au concessionnaire implique une réelle exposition aux aléas du marché, de sorte que toute perte potentielle supportée par le concessionnaire ne doit pas être purement théorique ou négligeable. Le concessionnaire assume le risque d'exploitation lorsque, dans des conditions d'exploitation normales, il n'est pas assuré d'amortir les investissements ou les coûts, liés à l'exploitation de l'ouvrage ou du service, qu'il a supportés. »
Pour qu’il y ait délégation de service public, il faut donc :
- Un contrat qui a pour objet la gestion d’un service public
L’exploitation de remontées mécaniques constitue bien un service public, qualifié de « service public industriel et commercial » par le législateur (article L 342-13 du code du tourisme) et qui est étendu le cas échéant aux installations nécessaires à l’exploitation des pistes de skis.
- Un contrat qui confie la gestion de ce service à un « opérateur économique »
Cet « opérateur économique » peut être une personne privée ou une personne publique. Il faut souligner en effet qu’une personne publique peut être candidate à l’attribution d’un contrat de délégation de service public d’une autre personne publique. Une commune (ou toute autre personne publique) pourrait ainsi prendre en charge la gestion du service public des remontées mécaniques d’une autre commune dans le cadre d’un contrat de délégation de service public.
- Un contrat qui peut charger le délégataire de construire des ouvrages, de réaliser des travaux ou d’acquérir les biens nécessaires au service public
L’objet d’une délégation de service public ne se limite pas à confier une exploitation du service public au délégataire. Dans le cas du service public des remontées mécaniques, le délégataire peut être chargé de construire et de financer les installations techniques nécessaires à l’exploitation du service.
- Un contrat qui transfère au délégataire le risque d’exploitation
Le transfert au cocontractant de la personne publique du « risque d’exploitation » est la caractéristique principale de la délégation de service public, et ce qui la distingue fondamentalement du marché public. L’alinéa 2 de l’article L 1121-1 du Code de la Commande publique précise ce que signifie cette notion de « transfert du risque d’exploitation » : « la part de risque transférée au concessionnaire implique une réelle exposition aux aléas du marché, de sorte que toute perte potentielle supportée par le concessionnaire ne doit pas être purement théorique ou négligeable. Le concessionnaire assume le risque d'exploitation lorsque, dans des conditions d'exploitation normales, il n'est pas assuré d'amortir les investissements ou les coûts, liés à l'exploitation de l'ouvrage ou du service, qu'il a supportés ».
Le délégataire de service public assure donc la gestion du service à ses risques et périls. Il est l’employeur des personnels, maître d’ouvrage des travaux dont il assure le financement, responsable à l’égard des tiers. Il perçoit les recettes d’exploitation du service, provenant notamment des redevances versées par les usagers, et peut également, sous certaines conditions, percevoir des compensations financières de la part de l’autorité délégante. Pour autant le service public n’est pas « privatisé » (dans l’hypothèse où le délégataire est une personne privée) : contrairement à l’intitulé du contrat, ce n’est pas le service qui est « délégué », mais sa gestion.
La personne publique garde le contrôle du service public et celui-ci est soumis au respect de principes fondamentaux qui en constituent « les lois », et dont la personne publique est garante à l’égard des usagers.
La délégation de service public présente des avantages.
- Elle permet de faire appel à des savoir-faire dans la gestion du service public dont la collectivité publique ne dispose pas nécessairement.
- Elle permet de transférer sur un tiers le financement et le risque d’exploitation, ce qui pour une activité en grande partie saisonnière et soumise aux aléas climatiques comme le service public des remontées mécaniques et l’exploitation des pistes de ski n’est pas négligeable.
- Elle permet en principe d’optimiser le coût d’exploitation, dans la mesure où la rémunération du délégataire en dépend.
- Elle est attribuée au
terme d’une procédure redéfinie par le Code de la Commande publique qui laisse une assez large place à
la liberté contractuelle des
collectivités publiques.
Pour faciliter le contrôle de la personne publique sur l’exécution du contrat par le délégataire et pour obtenir des informations qui lui apparaissent nécessaires, notamment en matière financière, la délégation de la gestion du service public à un opérateur auquel la collectivité publique n’est pas étrangère, et sur lequel elle est en mesure d’exercer un contrôle étroit est envisageable : c’est l’hypothèse de la délégation à une société d’économie mixte (SEML), ou à une Société publique locale (SPL).
Important Si les personnes publiques ont le choix quant au mode de gestion du service des remontées mécaniques sur leur territoire, en revanche il convient de relever que le choix du marché public parait le moins approprié au regard des coûts financiers qu’il implique.
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[1] Le paiement différé est interdit par l’article L2191-5 du CCP.
[2] Ainsi, par exemple, du principe fixé à l’article L2113-10 du CCP selon lequel les marchés doivent être passés en lots séparés.
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