Loi ASAP du 7 décembre 2020
(dernière mise à jour le 07/04/2021)
Présentation de la situation
La loi d’accélération et de simplification de l’action
publique dite loi ASAP, loi n°2020-1525 du 7 décembre 2020, a inscrit dans le
code de la Commande publique des obligations de souplesse concurrentielle et
procédurale pour faire face aux circonstances exceptionnelles. Ainsi, cette loi
vient officialiser la souplesse qui avait vu le jour avec les ordonnances dans
le domaine de la Commande publique au début de la crise sanitaire en mars 2020.
Cette loi consacre un corpus propre à des circonstances exceptionnelles, à
travers une souplesse apportée dans de nombreux domaines de la commande
publique.
La flexibilité procédurale
L’adaptation des dossiers de consultation
L’article L.2711-3 du
Code de la Commande publique prévoit que l’adaptation des documents de
consultation peut même intervenir en cours de procédure, il convient alors de
modifier ou de réinterpréter les termes, notamment d’un règlement de
consultation, au regard de la circonstance exceptionnelle. L’acheteur doit
anticiper ces adaptations dès la rédaction de nouvelles pièces.
Ainsi, l’exigence
de visite sur site peut être adaptée, tout comme la phase de négociation dans
les locaux de l’acheteur qui pourrait se faire en visioconférence, sont des
adaptations possibles des dossiers de consultation.
La prolongation de la durée contractuelle
L’article L.2711-5
du Code de la Commande publique prévoit que les marchés publics dont l’échéance
intervient pendant la période de circonstances exceptionnelles peuvent être
prolongés par avenant, au-delà de la durée prévue par le contrat lorsque l’organisation
d’une nouvelle procédure concurrentielle n’est pas envisageable.
Cette prolongation
est limitée à 4 ans (si pouvoir adjudicateur), 8 ans (si entité adjudicatrice)
sauf cas exceptionnels (ex : amortissement de l’investissement sur une
durée supérieure), et pour les autres marchés à une durée ne pouvant excéder la
période de circonstances exceptionnelles, « augmentée de la durée
nécessaire à la remise en concurrence à l’issue de l’expiration de cette
période », soit 3 à 4 mois.
La souplesse face aux retards
L’article L.2711-7 du
Code de la Commande publique dispose que le délai d’exécution d’une obligation
contractuelle peut être prolongé d’une durée équivalente à la période de
non-respect du délai d’exécution résultant directement des circonstances
exceptionnelles, si le titulaire n’a pu respecter ce délai ou que cette
exécution dans les temps exigerait des moyens faisant peser une charge
manifestement excessive sur le titulaire.
Le titulaire doit
néanmoins anticiper ce retard et le notifier à l’acheteur !
L’inapplicabilité des pénalités de retard
L’article l.2711-8 du
Code de la Commande publique consacre l’impossibilité d’appliquer des pénalités
ou d’engager la responsabilité du titulaire pour retard ou défaut de livraison
ou d’exécution, dès lors que ce dernier démontre qu’il ne dispose pas de moyens
suffisants ou faisant peser une charge manifestement excessive, pour exécuter « tout
ou partie d’un bon de commande ou d’un contrat ».
La création de la notion d’intérêt général
L’article
131 de la loi ASAP est venu rajouter le « motif d’intérêt général »
au nombre des raisons qui peuvent justifier de passer un marché sans publicité
ni mise en concurrence. Pour rappel, un acheteur peut recourir à ces marchés
lorsque le respect d’une procédure concurrentielle serait « inutile,
impossible ou manifestement contraire aux intérêts de l’acheteur ».
Cette
mesure vise à ajouter l’intérêt général comme cas de recours possible à un
marché passé sans publicité ni mise en concurrence, afin de renforcer le tissu
économique des territoires en facilitant la conclusion des marchés avec des PME
qui n’ont souvent pas les moyens techniques et humains pour s’engager dans une
mise en concurrence.
Ce serait au pouvoir réglementaire de déterminer les motifs d’intérêt général susceptibles de justifier une telle dérogation, et non à l’acheteur.
Les différentes catégories de marché
Les marchés de substitution
Est
codifiée la possibilité pour un acheteur confronté à des circonstances
exceptionnelles, rendant impossible pour un titulaire l’exécution de son
marché, totale ou partielle, de conclure « un marché de substitution avec un tiers pour satisfaire ceux de ses
besoins qui ne peuvent souffrir aucun retard, nonobstant toute clause d’exclusivité
et sans que le titulaire du marché initial puisse engager, pour ce motif, la
responsabilité contractuelle de l’acheteur ».
Ce
marché de substitution pourra être temporaire et ne pas se traduire par une
défaillance définitive. L’éventuel surcoût de ce marché de substitution ne
pourra pas être imputé au titulaire du marché initial, ni être réalisé à ses
frais et risques.
Les marchés globaux
Les
marchés globaux sont ceux de conception-réalisation, de performance
environnementale et sectoriels.
L’article
L.21529du Code de la Commande publique prévoie, pour ces marchés, un critère d’attribution portant sur la « part
d’exécution que le soumissionnaire s’engage à confier à des petites et moyennes
entreprises ou artisans ». Sa pondération est laissée librement à l’appréciation
de l’acheteur.
Les marchés réservés
L’impossibilité qui existait de réserver un même marché ou lot, en visant à la fois des enjeux d’insertion de personnes handicapées et de personnes défavorisées, est corrigée par l’article 141 de la loi ASAP.
La notion de concurrence
Le rallongement des délais
concurrentiels
L’article
L2711-4 du Code de la Commande publique prévoit permet de rallonger les délais d’ouverture
à la concurrence d’une durée suffisante, dont l’appréciation se fait au cas par
cas. Les acheteurs ont l’obligation d’adapter leurs délais d’ouverture aux
circonstances du moment. La crise sanitaire constitue une externalité qui peut
handicaper les soumissionnaires, rendant indispensable l’allongement des délais
d’ouverture à la concurrence.
La concurrence pour les services
juridiques
L’article
R.2123-8 du Code de la commande publique prévoit que les services juridiques
définis à l’article R.2123-1, quel que soit leur montant, font l’objet de « modalités
de publicité et de mise en concurrence », « librement » définies
par l’acheteur, « en fonction du montant et des caractéristiques du marché ».
L’article
140 de la loi ASAP prévoit deux cas d’exonération concurrentielle au sein de l’article
L.2512-5 : les prestations de consultations juridiques et celles de
représentation légale d’un client par un avocat dans le cadre d’un mode
alternatif de règlement des conflits ou en amont d’une probable procédure
contentieuse.
La concurrence pour les travaux de
moins de 100 000€ HT
De
manière temporaire, tout type de travail relevant d’une même opération estimée
à moins de 100 000€ HT peut faire l’objet d’un marché sans publicité ni
mise en concurrence. Il faut néanmoins que l’offre choisie soit pertinente,
avec une bonne utilisation des deniers publics, et il ne faut pas « contracter
systématiquement avec un même opérateur économique lorsqu’il existe une
pluralité d’offres susceptibles de répondre au besoin ». Pour des
structures d’achat de taille modeste, il est conseillé de procéder à trois
demandes de devis. Cela est à apprécier au cas par cas.
Ce
seuil n’est pas d’application rétroactive.
En
dehors de travaux, seuls les achats innovants peuvent être conclus sans
publicité ni mise en concurrence jusqu’à un seuil de 100 000€ HT et avant
la date du 26 décembre 2021.