JURISMONTAGNE
PLATEFORME JURIDIQUE AU SERVICE DES ADHÉRENTS
DE L'ASSOCIATION NATIONALE DES MAIRES DES STATIONS DE MONTAGNE
CONNEXION

Adaptation du droit de la commande publique - Covid19

Article publié le 13/05/2020
(dernière mise à jour le 13/05/2020)
Description :
droit de la commande publique - suspension - délai - redevance - état d'urgence sanitaire - marché public - concession

L'accès à la totalité de l'article est réservé aux adhérents
Vous n'êtes pas encore adhérent ? Toutes les informations sont ici

Période d’adaptation des règles des marchés publics

La période d’adaptation du droit de la commande publique s’étend du 12 mars 2020 jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire, augmentée d’une durée de deux mois à l’issue de cette date, comme le précise l’ordonnance n°2020-319 du 25 mars 2020 sur l’adaptation des règles de la commande publique.

La mise en concurrence

Les règles relatives à la mise en concurrence sont adaptées, notamment si la période d’urgence sanitaire a empêché les candidats de présenter leurs candidatures et offres dans le délai imposé par la procédure de mise en concurrence. La priorité est donnée au respect du principe d’égalité de traitement des candidats, la période de l’urgence sanitaire peut être vue comme troublant ces conditions d’égalité.

La durée du contrat

Pendant cette période d’urgence sanitaire, certains contrats de la commande publique vont arriver à terme, or la continuité doit prévaloir pour les pouvoirs publics d’où une prolongation possible par avenant de ces contrats au-delà de la durée prévue par le contrat, à une condition : il faut que l’organisation de la procédure de mise en concurrence ne puisse être mise en œuvre.

Cette prolongation se voit dispensée de l’examen préalable par l’autorité compétente. Néanmoins, cette prolongation comporte une limite : celle de la période d’adaptation des règles de la commande publique, augmentée de la durée nécessaire à la remise en concurrence.

L’absence de sanction pour charge manifestement excessive

L’ordonnance fait référence à de nombreuses reprises à la charge manifestement excessive qui permet la dérogation aux règles du droit commun. Malheureusement, l’ordonnance ne vient pas préciser ce qu’est une charge manifestement excessive, c’est donc un terme à apprécier avec prudence, son sens n’étant pour le moment pas encore déterminé.

Ainsi, l’article 6 de l’ordonnance n°2020-319 du 25 mars 2020 accorde une grande part à la charge manifestement excessive :

  • Pour la prolongation du délai d’exécution du contrat
  • Pour justifier le surcoût relatif à l’exécution du contrat, vis des moyens supplémentaires non prévus initialement
  • Pour l’absence de sanction en cas d’impossibilité d’exécution de tout ou partie du contrat

L’impossibilité d’exécuter tout ou partie du contrat doit être motivée soit par des moyens insuffisants soit du fait d’une charge manifestement excessive, et ce n’est qu’à cette condition que le titulaire du contrat ne sera ni sanctionné ni ne verra sa responsabilité contractuelle engagée.

Le titulaire ne peut être indemnisé des dépenses engagées par l’acheteur qu’à la condition où l’annulation ou la résiliation du contrat est exclusivement due à l’état d’urgence sanitaire.

Deux cas de suspension sont prévus :

  • La suspension du marché à prix forfaitaire : un avenant détermine les modifications du contrat, sa reprise à l’identique ou sa résiliation, ainsi que les sommes dues
  • La suspension de l’exécution d’une concession entraîne la suspension du versement d’une somme au concédant.

L’article 6 de l’ordonnance n°2020-319 du 25 mars 2020 met ainsi en place de nombreux outils d’adaptation des règles de droit commun de la commande publique, mais ces outils sont à utiliser avec prudence, notamment en ce qui concerne la charge manifestement excessive, qui n’est actuellement pas clairement définie.

Les apports de l’ordonnance n°2020-460 du 22 avril 2020

L'ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 susvisée est ainsi modifiée :

1° A l'article 6 :

a) Le 5° est remplacé par les dispositions suivantes :

« 5° Lorsque l'exécution d'une concession est suspendue par décision du concédant ou lorsque cette suspension résulte d'une mesure de police administrative, tout versement d'une somme au concédant est suspendu et si la situation de l'opérateur économique le justifie et à hauteur de ses besoins, une avance sur le versement des sommes dues par le concédant peut lui être versée. A l'issue de cette suspension, un avenant détermine, le cas échéant, les modifications du contrat apparues nécessaires. » ;

b) Il est ajouté un 7° ainsi rédigé :

« 7° Lorsque le contrat emporte occupation du domaine public et que les conditions d'exploitation de l'activité de l'occupant sont dégradées dans des proportions manifestement excessives au regard de sa situation financière, le paiement des redevances dues pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public est suspendu pour une durée qui ne peut excéder la période mentionnée à l'article 1er. A l'issue de cette suspension, un avenant détermine, le cas échéant, les modifications du contrat apparues nécessaires. » ;

2° Il est inséré un article 6-1 ainsi rédigé :

« Art. 6-1.-Par dérogation aux articles L. 1411-6 et L. 1414-4 du code général des collectivités territoriales, les projets d'avenants aux conventions de délégation de service public et aux marchés publics entraînant une augmentation du montant global supérieure à 5 % sont dispensés, respectivement, de l'avis préalable de la commission mentionnée à l'article L. 1411-5 du même code et de celui de la commission d'appel d'offres. »

 Cette ordonnance, notamment son article 20 vient compléter l’adaptation des règles de la commande publique énoncée dans l’ordonnance n°2020-319 du 25 mars 2020, et son article 6.

Trois apports se dégagent de cet article :

  • Concernant les suspensions d’exécution : en cas de suspension décidée par le concédant ou du fait d’une mesure de police administrative, tout versement d’une somme au concédant est suspendu et une avance sur le versement des sommes dues par le concédant peut lui être versé. Mais ce dispositif exige que la situation de l’opérateur économique le justifie et à hauteur de ses besoins. Il s’agit d’un dispositif qui s’applique in facto, sans préciser ce qui permet de justifier un telle avance.

De plus cet article ne précise pas quelles sont les sommes en question, même s’il semble que cela désigne toutes les sommes dues au concédant. L’article ne définit pas à partir de quel moment la situation de l’opérateur économique le justifie ni comment sont alors calculés ses besoins, ce dispositif est donc à appréhender avec prudence. La rédaction est ainsi large mais imprécise.

Cette suspension des versements si elle a lieu concerne la période d’application de l’ordonnance, soit la période d’urgence sanitaire augmentée de deux mois.

  • Concernant les occupations du domaine public : il y a suspension des redevances dues par l’occupation ou l’utilisation du domaine public pour une période ne pouvant excéder la période d’urgence sanitaire augmentée de deux mois, entraînant une exception à l’interdiction de gratuité pour l’occupation du domaine public. Mais il y a une condition : la dégradation de l’activité de l’occupant doit l’être dans « des proportions manifestement excessives au regard de sa situation financière ». Une fois de plus, ce dispositif ne précise pas ce qu’est une proportion manifestement excessive, et l’outil doit être utilisé avec prudence.
  • Concernant les avenants au contrat : cette disposition ressemble au droit commun, incitant ainsi les parties à réexaminer le contrat à la lumière de la situation nouvelle. La seule dérogation concerne les projets d’avenant entraînant une augmentation du montant global supérieure à 5%, qui se trouvent désormais dispensé de l’avis préalable de la commission d’appel d’offre et de la commission de l’article L.1411-5 du CGCT.